9 septembre 2021

L'Appel

A partir du 31 juillet 1914jour de lassassinat de Jean Jaurès, plusieurs intellectuels étrangers en France font paraître dans la presse des appels au soutien de leur patrie d’adoption.

Parmi eux, l’Américain Georges Casmèze reprend l3 aoûtalors que lAllemagne de Guillaume II déclare la guerre à la France, l’appel rédigé par l’auteur suisse Blaise Cendrars quelques jours plus tôt et publie ainsi un article dans le New York Herald. Cet article fait naître chez un grand nombre de ses concitoyens  y compris, comme nous le verrons, ceux participant au développement deactivités du baseball  la volonté de passer à l’actionCes volontaires américains se heurtent cependant pour lheure à deux problèmes majeurs : d’une part, la neutralité des Etats-Unis étant le fer de lance de la politique du Président Wilson, ils encourent la déchéance de leur nationalité d’autre part, l’armée française n’accueille pas encore les étrangers dans ses rangs.

Le 8 août paraît au Journal Officiel un décret qui change tout pour eux en autorisant tous les étrangers, à partir du 21 août seulement, à s’engager dans la Légion Etrangère pour la durée de la guerre. En conséquence de la poussée allemande en direction de la Marne, les engagements se précipitent. Le poète Alan Seeger, qui quelques semaines auparavant avait convaincu Guillaume Appolinaire de publier un très long article sur le baseball dans Les Soirées de Paris (lire Surréaliste !)défile le 25 août, totalement exalté, en brandissant la bannière étoilée à la tête de dizaines de ses compatriotes Américains de Paris décidés à se battre.

Alan Seeger défile en tête des volontaires américains place de L'Opéra à Paris le 25 août 1914.

Un autre étudiant de Harvard dont l’affirmation, comme une bien naïve réponse à son camarade Seeger, est publiée dans la toute dernière édition de The Harvard Bulletinn’y changera rien :

« Je crois que s’ils avaient eu un championnat régulier de baseball en Europe, avec Berlin, Paris, Londres, Vienne, etc. comme participants, ainsi qu’une ligue mineure incluant Belgrade, Bruxelles et quelques autres capitales, les fans n’auraient jamais toléré le déclenchement de cette guerre durant la saison de baseball, et si elle avait été remise à après les World Series ils auraient eu tout le loisir de reprendre leurs esprits et sans doute n’auraient-il jamais eu cette guerre. »[i]

Cette idée sera très souvent reprise dans la presse par la suite. Ainsi pourra-t-on lire par exemple :

« Et si des championnats internationaux avaient existé, semblables à ceux entre les villes des Etats-Unis et du Canada, il est indubitable que les effets auraient été favorables à la paix. […] Est-ce une sottise ? Le lecteur de l’histoire antique ne le dira pas. Les jeux ont fait autant pour la promotion de la solidarité que la religion grecque. » [ii]

Quelques mois plus tard, constatant tout ce gâchis, Foster écrira dans son éditorial du Spalding’s Base Ball Guide [iii] :

« Sans le malheureux déclenchement des hostilités générales en 1914, les progrès du baseball en France auraient été plus marqués que dans n’importe quelle autre nation d’Europe. »

Oui, le temps de l'insouciance est définitivement révolu.

***

i « Wars Should Never Interfere With Baseball », in The Day, 18 décembre 1914.

ii In The Tacoma Times, 2 juin 1915, p. 2.

iii Spalding’s Base Ball Guide 1915, p. 35.

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